Surqualifier l'inceste dans le Code pénal : une urgence

Surqualifier l'inceste dans le Code pénal : une urgence

Tabou des plus difficiles à briser, l'inceste n'est ni défini, ni inscrit en tant que tel dans le Code pénal, le terme n'apparaissant qu'au détour d'un titre. Face aux immobilismes qui ne profitent qu'aux victimes et alors que la parole se libère sur les pratiques à carcatère pédophile, j'ai tenu à déposer la proposition de résolution n° 751 (2018/2019) pour contribuer à engager, au plus vite, une véritable politique de prévention et de lutte contre l'inceste et inscrire dans le Code pénal une surqualification de l'inceste.

 

Texte de ma résolution n°751 :

Proposition de résolution visant à engager diverses mesures pour intensifier la lutte et la prévention contre l’inceste et à demander sa surqualification pénale

 
 

Le Sénat,

 
 

Vu l’article 34-1 de la Constitution,

 
 

Vu la loi n° 2018-703 du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes,

 
 

Vu la proposition de loi n° 293 d’orientation et de programmation pour une meilleure protection des mineurs victimes d’infractions sexuelles adoptées le 27 mars 2018 par le Sénat (texte adopté n° 84, 2017-2018),

 
 

Vu les conclusions de l’étude de la mission « sciences et société » du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) sur les violences sexuelles à caractère incestueux d’avril 2017 remise à la ministre des familles, de l’enfance et des droits des femmes,

 
 

Vu l’étude VIRAGE de l’Institut national d’études démographiques (INED) sur les violences sexuelles publiée en 2015,

 
 

Vu l’étude de législation comparée n° 102 établie par les services du Sénat en février 2002,

 
 

Vu l’article 33 de la Convention du Conseil de l’Europe sur la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels (dite « Convention de Lanzarote ») ratifiée par la France qui prévoit qu’en matière d’infraction sexuelle sur la personne d’un mineur, « chaque Partie prend les mesures législatives ou autres nécessaires pour que le délai de prescription pour engager des poursuites du chef des infractions établies conformément aux articles 18, 19, paragraphe 1. a et b, et 21, paragraphe 1. a et b, continue de courir pour une durée suffisante pour permettre l’engagement effectif des poursuites, après que la victime a atteint l’âge de la majorité, et qui est proportionnelle à la gravité de l’infraction en question »,

 
 

Vu les travaux de la mission commune d’information sur les politiques publiques de prévention, de détection, d’organisation des signalements et de répression des infractions sexuelles susceptibles d’être commises par des personnes en contact avec des mineurs dans le cadre de l’exercice de leur métier ou de leurs fonctions, lancée par le Sénat en octobre 2018,

 
 

Vu le premier plan interministériel de mobilisation et de lutte contre les violences faites aux enfants lancé le 1er mars 2017,

 
 

Considérant que compte tenu du devoir de soin, de secours et de sécurité inscrit dans le code de la famille, il est urgent de mener une politique pénale offensive contre l’inceste et de mettre en œuvre une politique transversale de sensibilisation, d’information et de prévention pour lutter contre l’inceste ;

 
 

Est convaincu de la nécessité du lancement d’une campagne nationale de sensibilisation et d’information auprès du grand public ;

 
 

Recommande le lancement d’un plan de formation d’envergure nationale auprès des agents de la fonction publique et des professionnels en contact avec les mineurs : secteur de l’enfance, de la petite enfance, secteur médicosocial, secteur éducatif, associatif, culturel et sportif, afin de favoriser une meilleure prise en compte de la parole des victimes et une détection systématique de ces atteintes spécifiques ;

 
 

Incite le Gouvernement à soutenir toute initiative qui aurait pour but de faire évoluer le code pénal en vue de sanctionner plus sévèrement les actes incestueux et de qualifier l’inceste en tant que tel dans ce code ;

 
 

Souhaite que soit rendu obligatoire le signalement des soupçons de violences sexuelles sur mineurs, y compris pour les médecins et professionnels de santé, tout en protégeant ces derniers de toutes poursuites devant les juridictions pénales et les instances disciplinaires professionnelles ;

 
 

Reconnaît que l’inceste ne peut pas être un acte consenti et formule le souhait que ce principe soit reconnu explicitement dans le code pénal ;

 
 

Surveillera avec diligence l’application des mesures inscrites dans le premier plan interministériel de lutte contre les violences faites aux enfants lancé le 1er mars 2017, dont celles relatives aux atteintes sexuelles à caractère incestueux ;

 
 

Insiste sur l’importance de développer l’information des enseignants et des enfants par une campagne d’information auprès des élèves, de la maternelle jusqu’au lycée, sur leurs droits et sur les limites à ne pas dépasser concernant leur intimité, sur l’existence du numéro d’appel « 119 » et de son rôle ;

 
 

Appelle à la création d’un organisme interministériel dont l’objet serait de piloter la prévention de l’inceste, d’informer le public, de coordonner la recherche et de protéger les victimes ;

 
 

Demande au ministère de la justice d’agir pour réduire la durée d’instruction et de jugement créant une attente parfois de plusieurs années, traumatisante pour l’enfant et d’améliorer l’aide juridictionnelle pour les victimes de crimes sexuels.

 

 

 

Retrouvez le texte intégral avec l'exposé des motifs 

 

Dossier pour télécharger le texte intégral de la PPR751 en format PDF

 

Je regrette qu'à plusieurs occasions, notament le mercredi 6 novembre 2019, lors de la discussion au Sénat de la Proposition de loi Pradié visant à agir contre les violences au sein de la famille, les amendements que j'avais déposés pour accentuer la lutte contre l'inceste et en tirer les conséquences sur le plan pénal, par exemple, concernant l'autorité parentale, n'aient pas été adoptés par le Sénat.