PLF 2019 - Mission Recherche et Enseignement supérieur

PLF 2019 - Mission Recherche et Enseignement supérieur

C'est lundi 3 décembre que je suis intervenue dans la discussion générale relative aux crédits de la mission recherche et  Enseignement supérieur dans le Budget 2019.

 

Texte intégral prononcé dans l'hémicycle :

 

"Monsieur le président, Madame la Ministre, Mesdames et Messieurs les Rapporteurs, Mes chers collègues,

          « Dans la lutte qui vient de finir, l'infériorité de la France a été surtout intellectuelle ; ce qui nous a manqué, ce n'est pas le cœur, c'est la tête », a écrit Ernest Renan, dans « la réforme intellectuelle et morale » en analysant la défaite de 1870.         

Alors que l’intelligence artificielle est partout, de l'industrie à la santé en passant par l'environnement, l'énergie et surtout la défense, il faut pouvoir placer rapidement la France en pointe des Nations les plus influentes en ce domaine.

Mme la Ministre, vous avez dévoilé le 28 novembre à Toulouse, la « stratégie nationale de recherche en intelligence artificielle », qui fait sienne cette ambition. Ce plan va bénéficier, au cours des quatre prochaines années, d’une enveloppe de 665 millions d’euros de la part de l’État, montant qui grimpera à un peu plus d’un milliard d’euros pour la période 2019 – 2022.

Si le signal est fort, ce secteur continuera, néanmoins, à voir ses cerveaux fuir à l'étranger où les chercheurs français sont parmi les plus courtisés. Pour inverser cette tendance, il serait urgent de revaloriser les carrières des enseignants-chercheurs, et notamment dans l’intelligence artificielle. Le rapport de Cédric Villani propose, d’ailleurs, de doubler le montant de leur salaire et ce, dès le début de leur carrière.

Malheureusement, vous semblez exclure définitivement cette modalité et je serai vigilante à ce que d’autres voies soient trouvées pour lancer ce chantier de la revalorisation salariale. Notre rapporteure a estimé que le doublement du montant des primes de trois chercheurs sur quatre s’élèverait à 20 millions d’euros pour le CNRS et entre 30 et 35 millions d’euros pour l’ensemble des Etablissements Publics à caractère scientifique et technologique. Cette réforme ambitieuse serait de nature à renforcer la compétitivité de la France.

Autre point de vigilance que je veux soulever : le manque de transparence sur le soutien de l’Etat aux domaines de recherche jugés prioritaires. La concomitance de nombreux dispositifs et d’annonces parallèles rendent quasi-impossible d’évaluer le soutien financier réel de l’Etat aux recherches considérées comme prioritaires, et ce d’autant plus que la plupart de ces financements ne sont pas liés à la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

Globalement, l’augmentation de crédits demandés au titre des programmes « Recherche » de la présente mission est de 2,4 % en Autorisation d’engagement et de 2,9 % en Crédits de Paiement, ce qui traduit une ambition pour la recherche française, qui reste en deçà de nos espérances.

Alors que l’on connait l’importance stratégique de la Recherche et du développement dans la croissance économique, le Groupe RDSE regrette qu’un effort supplémentaire n’ait pas été fait afin d’approcher l’objectif « Europe 2020 » qui a pour ambition de porter à cet horizon la part de Recherche et Développement à 3% du PIB. Or d’après les indicateurs, en 2019, cette part sera seulement maintenue au niveau de 2018, soit 2,5% du PIB.

Je regrette également que l’évolution des crédits à la hausse, sur le volet recherche, soient uniquement captés par les programmes du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, alors que les programmes dépendant d’autres ministères verront, au mieux leurs moyens stagner, au pire diminuer.

Nous nous interrogeons sur la soutenabilité d’une telle politique, à moyen terme, et son implication sur les programmes en question, comme ceux visant à promouvoir la recherche culturelle et la culture scientifique et technique, avec en son cœur, Universcience dont le budget diminue une nouvelle fois.

Même au sein de la MIRES (Mission interministérielle Recherche et Enseignement Supérieur) dont le budget se voit consolidé, nous ne pouvons ignorer l’impasse budgétaire dans laquelle se trouvent certains organismes de recherche, qui ne bénéficient pas des financements adéquats pour mener à bien les plans qui leurs sont commandés, et ce au niveau du CEA, de l’INSERM ou de l’IFREMER.

Parallèlement, la réforme de l'ISF a fait chuter les dons "d'au moins 50%", selon France Générosités, notamment en faveur d’organisme de recherches qui peuvent être fortement dépendant de ces contributions, comme le CNRS.

Le récent rapport de la cour des comptes sur le Mécénat ne traite malheureusement pas du mécénat des particuliers, mais je rejoins la rapporteure pour dire qu’il est nécessaire de trouver une solution pour le favoriser, afin de retrouver le niveau des montants dont bénéficiaient les opérateurs de recherche les années précédentes.

Je dirai que sur le volet de l’Enseignement supérieur, l’ambition portée par le Gouvernement ne se retrouve pas dans ce budget.

Quant au plan étudiant, 123 millions supplémentaires doivent y être consacrés afin de répondre aux nouveaux défis de notre système, notamment l’afflux d’étudiants. Toutefois, ces nouveaux moyens risquent surtout d’être absorbés par la progression naturelle de la masse salariale et des dépenses. D’après le rapport, une fois que les établissements se seront réellement acquittés de leurs charges incontournables, ne resteraient plus que 26 millions d’euros pour lancer des actions véritablement nouvelles en 2019. C’est trop peu !

Je rejoins le rapporteur pour dire qu’il faut renforcer le pilotage des dotations des Universités, généraliser le dialogue stratégique entre le Ministère et les autorités académiques pour aller vers un pilotage plus fin des ressources des opérateurs.

Mes chers collègues, même si ce projet de budget comporte des points d’inquiétude, relatifs à l’investissement de la France dans la connaissance et la recherche, clé de voûte de notre croissance future, il présente néanmoins des points positifs au premier plan desquels, une hausse, c’est pourquoi, même s’il aurait pu aller plus loin, notre groupe votera en faveur de ce budget.

Je vous remercie."