Femmes et santé : les enjeux d'aujourd'hui
Dans la perspective de l'examen par le Sénat du projet de loi de modernisation de notre système de Santé, courant septembre 2015, la Délégation aux Droits des Femmes m'a désignée co rapporteur pour avis avec ma collègue sénatrice, A. BILLON, sur ce texte.
Ce texte sera examiné par les Sénateurs, dans l'hémicycle, à partir du 14 septembre 2015.
Nous avons présenté les conclusions de ce rapport devant la Délégation et la Commission des affaires sociales du Sénat, dont voici les 28 principales recommandations :
- POUR UNE APPROCHE DE LA SANTÉ QUI PRENNE DAVANTAGE EN COMPTE LES SPÉCIFICITÉS FÉMININES
1ère recommandation -
La délégation, préoccupée par la prise de conscience insuffisante, en France, de l'importance du risque cardiovasculaire pour les femmes, souhaite :
- qu'une campagne nationale d'information mette en évidence la réalité de ce risque pour les femmes et la particularité des symptômes observés chez les femmes ;
- une meilleure sensibilisation et formation des professionnels de santé et des urgentistes aux spécificités de ces symptômes.
2ème -
La délégation suggère qu'une campagne nationale d'information sensibilise les femmes à la nécessité de procéder régulièrement au dépistage du cancer du col de l'utérus.
3ème -
Face à la progression rapide du tabagisme féminin en France et alertée par le constat établi par la DREES du tabagisme des femmes enceintes, la délégation souhaite la mise en place d'une prévention précoce du tabagisme féminin qui peut passer :
- par une campagne nationale d'information spécifiquement ciblée sur les femmes ;
- et par un suivi personnalisé de toute femme enceinte consommant des produits du tabac, pour la sensibiliser à l'intérêt d'arrêter sa consommation, comme l'a prévu l'Assemblée nationale à l'article 33 bis du projet de loi.
4ème -
La délégation estime nécessaire la mise en place d'une formation approfondie des professionnels de santé pour une prise en charge précoce et adaptée des troubles liés aux violences sexuelles, intégrant la connaissance des voies de signalement, des certificats médicaux de coups et blessures ainsi que de la notion d'incapacité totale ou partielle de travail.
5ème - La délégation souhaite que soit engagée une réflexion sur la pénibilité spécifique subie par les femmes au travail et sur l'accès des femmes à des formations améliorant leurs chances d'évolution professionnelle.
6ème - La délégation demande une réorientation de la politique publique de prévention de la contamination par le VIH et les IST et d'information de la population, en tenant compte :
- du fait que 51 % des personnes vivant avec le VIH et le sida dans le monde sont des femmes ;
- et de la vulnérabilité particulière des femmes de plus de 50 ans au VIH et aux IST.
Septième recommandation - La délégation souhaite que l'information des femmes enceintes et de leur entourage sur les risques liés au diabète gestationnel et à l'hypertension soit renforcée.
Huitième recommandation - La délégation déplore une prise de conscience inégale des enjeux de la santé environnementale, plus particulièrement dans le domaine de la santé maternelle et infantile, et souhaite en conséquence :
- rendre obligatoire une formation à la santé environnementale des professions médicales et de tous les professionnels en contact avec les jeunes enfants et leurs parents ;
- la mise en oeuvre d'une sensibilisation des agences régionales de santé à ces enjeux.
Neuvième recommandation - La délégation recommande l'adoption, par le Sénat, des dispositions adoptées par l'Assemblée nationale pour améliorer la lutte contre la maigreur excessive.
Dixième recommandation - La délégation souligne l'importance d'attribuer des financements adéquats aux associations qui contribuent au suivi médical des populations précaires, et plus particulièrement au suivi gynécologique des femmes en situation de précarité.
Onzième recommandation - La délégation souhaite que les études et recherches en biologie et en médecine prenant en considération les différences entre femmes et hommes soient encouragées.
Elle considère qu'il est urgent de sensibiliser les professionnels de santé à l'importance de la prise en compte des spécificités que présentent les femmes pour un meilleur diagnostic de certaines pathologies.
Douzième recommandation - Considérant que les priorités en matière de recherche et d'orientation de la santé publique peuvent être infléchies par la présence d'un nombre plus important de femmes investies de responsabilités dans ce domaine, la délégation soutient le principe d'égal accès des femmes et des hommes, introduit par l'Assemblée nationale à l'article 42 bis A du projet de loi, aux conseils d'administration et aux conseils de surveillance des établissements et organismes tels que l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM), les ARS, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), l'Établissement français du sang (EFS) et l'Agence de la biomédecine (ABM).
Dans cet esprit, la délégation recommande aussi de continuer à encourager l'orientation des jeunes filles vers les filières scientifiques et de favoriser les carrières des chercheures scientifiques.
B. POUR UNE CONSOLIDATION DES ACQUIS EN MATIÈRE DE SANTÉ SEXUELLE ET REPRODUCTIVE
Treizième recommandation - La délégation considère que donner aux médecins la possibilité de distribuer gratuitement une contraception à leurs patientes mérite d'être envisagé, sous réserve de la généralisation d'une formation approfondie aux diverses méthodes contraceptives susceptibles d'être proposées à chacune.
Quatorzième recommandation - La délégation est favorable à l'institution d'une consultation gratuite, avec une sage-femme ou un médecin, pour informer les mineures en matière de contraception, dans des conditions leur garantissant la plus totale discrétion.
Quinzième recommandation - La délégation recommande :
- que l'organisation des séances d'éducation à la sexualité et d'information sur l'égalité prévues par le code de l'éducation soit inscrite dans les lettres de mission des chefs d'établissement de l'enseignement secondaire, et que les moyens nécessaires leur soient attribués à cet effet;
- que ces séances fassent l'objet d'un suivi.
Seizième recommandation - La délégation est favorable au maintien, par le Sénat, du principe inscrit à l'article 3 bis du projet de loi par l'Assemblée nationale, selon lequel toute personne a le droit d'être informée sur les méthodes contraceptives et d'en choisir une librement.
Dix-septième recommandation - La délégation souhaite que le code du travail prévoie un régime d'autorisation d'absences pour les salariées bénéficiant d'une assistance médicale à la procréation, et empêche toute discrimination à l'embauche à l'encontre des femmes engagées dans un processus de PMA.
Dix-huitième recommandation - La délégation est favorable au maintien, par le Sénat, du principe inscrit dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'article 31, selon lequel toute personne a le droit d'être informée sur les méthodes abortives et d'en choisir une librement.
Dix-neuvième recommandation - La délégation soutient l'extension aux centres de santé de la possibilité de pratiquer des IVG instrumentales, adoptée en première lecture à l'Assemblée nationale.
Vingtième recommandation - La délégation recommande l'existence d'un centre pratiquant des IVG dans chaque hôpital, ce qui implique :
- la mise en place d'unités fonctionnelles, voire de services dédiés au sein des hôpitaux ;
- le recrutement de professionnels investis, formés et compétents.
Vingt-et-unième recommandation - La délégation est favorable au maintien de la disposition, adoptée par l'Assemblée nationale à l'article 38 du projet de loi, concernant l'élaboration, dans chaque région, d'un plan d'action pour l'accès à l'IVG par l'agence régionale de santé.
La délégation recommande également un suivi de la pratique des IVG en milieu hospitalier par les ARS.
Vingt-deuxième recommandation - La délégation est favorable à la revalorisation du statut des praticiens exerçant dans les centres d'IVG et à un assouplissement des conditions de durée de service minimale s'imposant à ces praticiens.
Vingt-troisième recommandation - La délégation souhaite que la pratique par les sages-femmes des IVG médicamenteuses soit assortie d'une convention avec des centres référents qui pratiquent les IVG, afin d'assurer la qualité, la sécurité et le respect des femmes qui demandent une interruption de grossesse et de leur garantir le libre choix de la méthode d'IVG.
Vingt-quatrième recommandation - La délégation demande que la première demande d'IVG ne soit pas obligatoirement recueillie par un médecin.
Vingt-cinquième recommandation - La délégation soutient la suppression du délai de réflexion d'une semaine entre la première et la seconde consultation pour une interruption volontaire de grossesse, adoptée en première lecture à l'Assemblée nationale.
Vingt-sixième recommandation - La délégation est favorable à l'amélioration de la procédure de prise en charge de tous les actes liés à l'IVG pour les mineures.
Vingt-septième recommandation - La délégation souhaite qu'une campagne nationale d'information permette de mettre en valeur le rôle central des sages-femmes comme partenaires indispensables de la santé des femmes tout au long de leur vie, même en dehors des périodes de grossesse et d'allaitement, et de sensibiliser les femmes à leurs compétences en matière de contraception et de dépistage de certains cancers.
Vingt-huitième recommandation - La délégation souhaite que le suivi gynécologique des femmes homosexuelles fasse l'objet d'une attention particulière et que les professionnels de santé soient sensibilisés à l'existence d'une sexualité féminine non hétérosexuelle.
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