Réforme du collège
J'ai posé une question crible thématique sur la réforme du collège, au Sénat, le 28 mai 2015.
C'est la Ministre de l'Education nationale, Mme Najat VALLAUD BELKACEM, qui m'a répondu.
Texte intégral de mon intervention :
Mme Françoise Laborde. "Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la réforme qui nourrit la polémique depuis bientôt un mois s'inscrit dans la continuité de la loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République, portée par votre prédécesseur, M. Vincent Peillon. Elle concerne principalement le contenu des enseignements, les outils pédagogiques et l'organisation du temps scolaire.
Même si nous nous inquiétons du court délai entre la publication du décret et sa mise en œuvre, à la rentrée 2016, les membres du groupe RDSE et moi-même tenons à réaffirmer notre soutien au collège unique, cet outil mis au service d'une ambition démocratique forte : assurer au plus grand nombre de jeunes le maximum de chances, comme le prônait Jean Zay, ministre de l'éducation du Front populaire (M. Roger Karoutchi s'exclame.), en 1937, entré hier au Panthéon.
Le collège unique, parachevé par la loi Haby en 1975, a permis d'ouvrir les portes de la connaissance à toute une classe d'âge qui, jusqu'alors, en était privée et entrait prématurément dans le monde du travail.
Les dispositions prévues dans votre réforme visent à dégager davantage de temps – trois heures en sixième, une à deux heures les autres années –, pour un accompagnement personnalisé. Pouvez-vous, madame la ministre, en définir plus précisément le cadre ?
L'instauration d'enseignements pratiques interdisciplinaires insuffle un renouveau pédagogique, et c'est bien. Mais pensez-vous qu'une année scolaire suffira pour adapter d'urgence l'organisation de la formation continue avant la rentrée 2016 ?
Nous tenons aussi à vous interroger sur la place des enseignements disciplinaires fondamentaux au sein de cette réforme, au premier rang desquels doit figurer le français.
Constatant une diminution du volume horaire accordé au français en sixième et convaincue, avec les membres du groupe RDSE, que la réussite scolaire dépend de la maîtrise de la langue française, tant orale qu'écrite, puisqu'elle rend possible l'apprentissage des connaissances, des savoir-faire, des nouveaux moyens de communication et d'information, sans oublier la formation de l'esprit critique, quels moyens entendez-vous déployer pour en faire la pierre angulaire de la réforme du collège ? Il faut augmenter les heures de français en sixième plutôt que les diminuer.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Madame la sénatrice Françoise Laborde, la réforme du collège a un objectif très simple : faire mieux apprendre chaque élève, afin que tous réussissent mieux. Vous avez eu raison de le dire, il nous faut affirmer ici que la réussite scolaire doit être offerte à chaque enfant, et nous partageons évidemment votre ambition. Un bagage commun doit être donné notamment à tous les enfants de moins de quinze ans qui fréquentent le collège que nous voulons unique, nous le réaffirmons ici, mais que nous ne souhaitons plus uniforme.
Ainsi, le collège doit mieux s'adapter aux difficultés ou, parfois, au niveau avancé de chaque collégien accueilli. À cet effet, nous avons voulu innover dans les pratiques pédagogiques, en introduisant davantage d'accompagnement personnalisé, de travail en petits groupes, et en créant les enseignements pratiques interdisciplinaires, sur lesquels je reviendrai ultérieurement.
Permettez-moi de répondre à vos trois questions.
L'accompagnement personnalisé aura vocation à la fois à expliciter aux élèves ce que l'on attend d'eux, à savoir les méthodes d'apprentissage : la façon de réviser ses leçons, de prendre des notes, de s'organiser pour réussir. Vous le savez, il existe un véritable changement entre l'école primaire et le collège, notamment en classe de sixième. C'est pour cette raison que trois heures par semaine seront consacrées à l'accompagnement personnalisé pour les collégiens de sixième.
Cet accompagnement sera évidemment fondé sur les programmes d'enseignement : durant ces trois heures, il ne s'agit pas d'enseigner aux élèves autre chose que ce qui est prévu dans les programmes.
Il permettra à ceux qui sont en difficulté de rattraper le retard pris et à ceux qui sont en avance d'approfondir leurs connaissances. Il ne porte donc en rien préjudice à ceux qui pourraient être les meilleurs. Au contraire, il les rendra excellents.
Les enseignements pratiques interdisciplinaires permettent de faire travailler à la fois des enseignants en équipe – le co-enseignement, avec plusieurs enseignants de disciplines différentes –, et les enfants en groupes, sous forme de projets concrets et pratiques. Ils font ainsi du learning by doing, comme disent les Britanniques :...
M. Bruno Sido. Et le français !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. ... ils ne se contentent pas des apprentissages théoriques, ils mettent en pratique ce qu'ils apprennent dans les disciplines fondamentales.
Non, le français ne perd rien à cette réforme, madame la sénatrice, comme d'ailleurs aucune des disciplines. En l'occurrence, de la sixième à la troisième, il y aura toujours 17 heures 30 de français par mois, comme c'est le cas actuellement.
M. le président. Il vous faut conclure, madame la ministre.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Je prendrai un dernier exemple, celui de l'enseignement pratique interdisciplinaire appelé « éducation artistique et culturelle » : la pièce de théâtre que joueront les collégiens a aussi pour objet de renforcer l'acquisition du français. Voilà en quoi cet enseignement sera utile aux fondamentaux. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – Mme Aline Archimbaud applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde, pour la réplique, brièvement.
Mme Françoise Laborde. Je serai très brève, monsieur le président. Les questions sont nombreuses, mais je sais que mes collègues en poseront.
J'aurais, madame la ministre, une dernière requête pratique. Pourriez-vous nous dire ultérieurement quelle incidence aura votre réforme sur le brevet des collèges ?"
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